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29 décembre 2013 7 29 /12 /décembre /2013 00:34

Sur ce blog, j'ai souvent joué le jeu des oscars et des pronostics (parce qu'il ne faut JAMAIS considérer les oscars comme autre chose de plus qu'une sorte de compétition sportive cinématographique avec ses mérites, ses coup-bas, ses déceptions). Souvent, j'ai été frustré par les résultats qui ne venaient pas toujours couronner mes chouchous de l'année. Alors, pour une fois, je vais décerner les trophés ! Ici, cinq lauréats dans chaque catégorie, pas de favoritisme, pas de tristes perdants mais que de valeureux gagnants, en tout cas parmi ceux qui ont l'immense honneur d'être cités dans ces parages. Les films concernés sont ceux que j'ai vu cette année : je tiendrais notamment compte des dates de sortie françaises et j'y mettrais occasionnellement des longs métrages projetés dans le cadre du Festival de Deauville mais qui ne sont pas encore visibles sur les écrans de l'Hexagone (si je réitère cet exercice l'année prochaine, ils seront évidemment absents). Ayant dû réduire ma consommation de films ces dernières semaines, il n'y a pas de Capitaine Phillips ou de The Immigrant qui auraient pû se tailler une place, en particulier dans les catégories d'interprétations. Pour la catégorie MEILLEURS FILMS, je renvoie directement à mon Top 15 de 2013. A présent, lançons-nous dans cette prestigieuse cérémonie qui nous permettra de faire un ultime bilan sur les oeuvres et les artistes qui ont marqué cette année.

 

MEILLEURES DIRECTIONS ARTISTIQUES 

(décors, costumes et effets spéciaux sont inclus dans le terme "direction artistique")

Cloud Atlas : Le film-gagnant sur tous les plans qui mélange les reconstitutions historiques pointilleuses avec la fantaisie des mondes futuristes de science-fiction. Un peu comme si les styles esthétiques radicalement opposés de Lincoln, des Hommes du Président, de Blade Runner et de Mad Max étaient réunis harmonieusement dans un seul même projet.

Gravity : La direction artistique s'est faite à 90% de façon numérique mais le boulot abattu pour reproduire minutieusement les combinaisons d'astronautes et les différentes stations spatiales est si faramineux que l'on croirait qu'Alfonso Cuaron est carrément parti dans le cosmos pour filmer son survival. Accessoirement, les meilleurs images de synthèse photoréalistes de l'Histoire du cinéma.

Le Transperceneige : Intégralement construit dans un immense plateau à Prague, le train "Transperceneige" est un interminable décor longiligne censé représenter tout un "microcosme". Impossible de prédire ce que l'on va trouver dans le wagon suivant : le dernier aquarium sur Terre ? Une salle de classe ? Un sauna pour riches ? Un ghetto pour les pauvres ? Un univers foisonnant dont on ne pourra apprécier tous les moindres détails qu'après bien des revisionnages.

Pacific Rim : Un blockbuster gargantuesque empruntant aux kaiju eigas, aux japanimes, aux jeux-vidéos, au steampunk, à Goya, aux comics,... Un fourre-tout lui-aussi très riche et pourtant très cohérent qui mèle impeccablement les images de synthèse avec des maquettes et des décors en "dur". Un régal de tous les instants pour les yeux de l'enfant qui est en chacun de nous. 

The Lone Ranger : Les westerns sont des occasions en or pour les cinéastes souhaitant tourner sur des plateaux démesurés avec des acteurs vétus de costumes flamboyants. Verbinski est l'un d'eux et ne le cache plus depuis Pirates des Caraïbes. On se croirait revenu à l'époque des John Ford et des Sergio Leone tant il essaye de privilégier les reconstitutions "physiques". Cela ne l'empêche pas de jongler merveilleusement avec des CGI (Computer-generated imagery ou images de synthèse) que beaucoup de spectateurs n'ont pas dû remarquer.

Extrait de la bande originale composée par M83 pour OBLIVION de Joseph Kosinski

MEILLEURES MUSIQUES ORIGINALES

Gravity - Steven Price : Inconnu il y a six mois, Price a frappé un grand coup avec sa B.O. très chouette pour le dernier film d'Edgar Wright et sa phénoménale partition pour le chef d'oeuvre de Cuaron. Un élément capital dans l'immersion du spectateur qui enchaîne les passages déroutants, terrifiants, poétiques, minimalistes puis somptueusement emphatiques vers la fin. Un bijou dans son genre.

Only God Forgives - Cliff Martinez : Le compositeur de la B.O. magique de Drive réitère sa collaboration très fructueuse avec Nicolas Winding Refn et livre une musique aux accents extrême-orientaux à la fois inquiétante et viscérale qui accompagne adéquatement les visions cauchemardesques qu'orchestre le génial cinéaste danois.

Oblivion - M83 : Joseph Kosinski, après avoir eu l'excellente idée d'employer le duo français Daft Punk pour son cyber Tron l'héritage, réitère en demandant à M83, l'autre grand groupe de musique électronique français du moment, de se charger de la musique de son Oblivion. En résulte une B.O. faisant parfois cho avec celle, magistrale, composée par Vangelis pour le grand Blade Runner, tout en se permettant quelques jubilatoires envolées lyriques lors de la séquence de la piscine ou encore de l'émouvant final

The Lone Ranger - Hans Zimmer : Ayant une immense carrière qu'on ne présente plus, Zimmer a une nouvelle fois été très occupé cette année avec le thème bourrin mais entrainant de Man of Steel, sa partition très rythmée pour le passionnant Rush et sa redite d'Inception à l'occasion du drame sérieux de Steve McQueen intitulé 12 Years a Slave. Mais c'est avec le western fou de Gore Verbinski qu'il signe sa meilleure musique depuis des lustres. Une B.O. à l'image du film : super dynamique, un peu folle, grandiloquente et respectueuse des standards élaborés par Ennio Morricone.

Trance - Rick Smith : Danny Boyle prouve encore une fois que la musique est l'un des atouts majeurs de ses longs métrages avec cette bande son rythmée, hypnotique et entêtante qui nous plonge aisément dans un état second aux côtés de James McAvoy pour nous rendre prompt à nous faire manipuler et triturer les méninges par la vénéneuse Rosario Dawson.

 

MEILLEURES PHOTOGRAPHIES

Gravity - Emmanuel Lubezki : Le directeur de la photographie le plus talentueux au monde actuellement avec Roger Deakins se frotte à la technologie numérique et redéfinit son métier en composant des plans informatiques d'une beauté et d'une complexité infinies. Les cadrages, les éclairages sidérants et les mouvements des fabuleux plans séquences immersifs,... tout ça a été préparé par Lubezki afin que chaque image soit à jamais gravée non seulement dans la rétine du spectateur mais aussi dans l'Histoire du cinéma.

Inside Llewyn Davis - Bruno Delbonnel : Abandonnant ses filtres jaunes-oranges, le chef opérateur français chargé de remplacer Deakins construit des plans hivernaux et cotonneux tout droit sortis d'un vieux rêve et se montre digne de son prédecesseur. A la fois glaciale et étonnemment chaleureuse, à la fois sombre et lumineuse, cette photographie pleine de contrastes s'inscrit directement dans ce que Delbonnel a fait de plus admirable dans sa carrière.

Lincoln - Janusz Kaminski : L'artiste polonais continue d'élaborer des tableaux évocateurs afin d'illustrer de manière prestigieuse les histoires de Maître Spielberg. L'image est toujours granuleuse mais le duo s'aventure cette fois encore plus loin dans la noirceur et dans la composition picturale. Rarement un personnage principal aura été magnifié et filmé sous toutes ses coutûres avec autant de justesse, de respect et d'inspiration. 

Only God Forgives - Larry Smith : Celui qui a éclairé et enregistré les étranges images de Stanley Kubrick à l'occasion d'Eyes Wide Shut est retourné voir Refn après avoir travaillé avec lui sur le formellement brillant Bronson et s'adonne intégralement à la fabrications de somptueux plans surréalistes aussi fascinants que dérangeants. Une succession de tableaux infernaux virtuoses, envoutants et délirants qui parviennent en quelques instants à caractériser un personnage et à rendre palpable une ambiance bien étrange.

The Master - Mihai Malaimare Jr. : A l'instar de celles d'Inside Llewyn Davis et de Lincoln, la photographie du drame de Paul Thomas Anderson s'inspire énormément des photos et des images d'époque afin de déterminer l'esthétisme qui enveloppe cette histoire du passé. A ce titre, le dernier long métrage du réalisateur de There Will Be Blood est le summum de cette pratique tant on pourrait croire qu'il a été tourné pendant les années 1950. Si le film a des défauts, pas un de ses plans n'en a. 

Extrait de la bande originale composée par Cliff Martinez pour ONLY GOD FORGIVES de Nicolas Winding Refn

MEILLEURES ACTRICES DANS UN ROLE SECONDAIRE

Le Congrès - Robin Wright : Certes, Robin Wright incarne le personnage principal mais une petite entorse était nécessaire vu que les deux tiers de l'intrigue prennent la forme d'un film d'animation (sans perf-cap), réduisant ainsi l'extraordinaire performance de l'actrice à un travail de doublage. Reste qu'il s'agit du rôle de sa vie et le fait que le sujet du long métrage soit une immense mise-en-abime d'elle-même n'est pas pour rien dans son intensité dramatique.

Lincoln - Sally Fields : Fields est une grande actrice et elle le prouve encore une fois en prêtant ses traits à l'unique personnage féminin un tant soit peu approfondi de cette histoire. Un rôle pas forcément valorisant puisqu'elle incarne une femme brisée par la mort d'un de ses fils et broyée par le statut de son mari. Sa souffrance est remarquablement transmise à l'écran lors de ses scènes avec Daniel Day Lewis et leur alchimie, vitale au récit, est des plus palpables.

The Master - Amy Adams : La mignonne petite actrice est en train de devenir une grande. Il serait temps de comprendre qu'on ne peut plus se permettre de l'ignorer. On a le privilège d'assister au tournant de sa carrière qui devrait lui permettre de s'imposer très prochainement comme une comédienne brillante capable d'être aussi séduisante et sensible que puissante et manipulatrice. Et elle l'est particulièrement dans le film d'Anderson où elle joue le véritable "maître" de l'intrigue. 

Very Good Girls - Elizabeth Olsen : La cadette Olsen a attendu son heure pour briller devant les caméras. Cela lui a conféré une maturité que ses soeurs-stars n'avaient pas avant de se faire dévorer par le système. La très belle actrice enchaine les blockbusters (Godzilla et Avengers 2) qui feront d'elle une tête d'affiche, mais on espère aussi la revoir dans ces films dits "mineurs" où elle a plus de place pour dévoiler l'immense étendue de ses talents. Ceux qui ne tomberont pas sous son charme dans Very Good Girls seront des monstres de froideur.

We Are What We Are - Julia Garner : Etrange jeune actrice que celle-là. On avait découvert son mystérieux visage peu commun dans le bon drame Electrick Children, mais les producteurs semblent être réticents à la faire travailler sur davantage de projets. Pourtant, elle confirme les espoirs placés en elle dans ce film d'horreur éprouvant et viscéral de Jim Mickle. Faussement fragile, Garner dévoile une ambiguité fascinante. Il serait temps qu'Hollywood se réveille !

 

MEILLEURS ACTEURS DANS UN ROLE SECONDAIRE

Le Congrès - Harvey Keitel : L'un des plus grands comédiens du Nouvel Hollywood s'était un peu perdu dernièrement mais il remonte magnifiquement la pente grâce à la première demi-heure du bijou d'Ari Folman. Son rôle de mentor-ami-amant(?) touchant lui permet de livrer le plus beau monologue vu sur un grand écran cette année. Une renversante prouesse de comédien qui rappelle pourquoi des Scorsese et des Tarantino se sont disputés ses faveurs.

Le Transperceneige - Song Kang-ho : L'acteur fétiche de Bong Joon-ho écope évidemment du personnage le plus intéressant et important dans le dernier film de son ami cinéaste. Une sorte de Han Solo drogué et politiquement incorrect, aussi hilarant que féroce. Il est l'élément perturbateur du Transperceneige, que ce soit le train éponyme de l'intrigue ou le film lui-même qui a nécessité la mise en place d'une grosse machinerie hollywoodienne pour voir le jour.

Lincoln - Tommy Lee Jones : Comédien grincheux qui avait enchainé une majorité de projets bassement mercantiles ces dernières années, Jones met de nouveau (enfin !) pleinement son caractère grognon au service d'un personnage historique radical, haut en couleur et admirable, dont la motivation sans faille qui l'a conduit à mener son valeureux combat pour les droits des Afro-Américains est révélé dans une bouleversante dernière séquence.

Prisoners - Jake Gyllenhaal : Comme DiCaprio, on l'a vu se plonger très jeune dans des rôles de plus en plus noirs pour prouver qu'il était entré dans la cour des grands. Il semble avoir trouvé l'âme soeur dans sa quête avec le cinéaste canadien Denis Villeneuve qui le magnifie dans la peau de cet enquêteur prêt à sombrer dans une folie et une violence lui tendant les bras. Sa composition est fascinante tant il use avant tout de sa gestuelle et de son regard pour sous-entendre ses névroses. 

Rush - Daniel Brulh : L'interprète allemand révélé par Inglourious Basterds trouve ici le personnage de sa carrière : le pilote de formule 1 Niki Lauda. Solitaire, renfermé, brillant, calculateur et animé par une insatiable envie de vaincre. Le drame qu'il vit au milieu du film confère une densité dramatique supplémentaire à son parcours et à sa rivalité avec l'anglais James Hunt, jusqu'à cette ultime belle scène révélant toute l'ambiguité de leur relation et de sa motivation sportive.

Extrait de la bande originale composée par Hans Zimmer pour THE LONE RANGER de Gore Verbinski

MEILLEURES ACTRICES DANS UN ROLE PRINCIPAL

Alabama Monroe - Veerle Baetens : L'actrice et chanteuse flamande livre une sublime composition dans ce mélodrame larmoyant. Personnage central de l'intrigue, muse pour son mari et mère desespérée par la maladie incurable de son unique enfant, Alabama Monroe est une femme dont la complexité et la sensibilité ne peuvent laisser de marbre. Baetens s'en tire admirablement dans un rôle où il était pourtant difficile de ne pas tomber dans un surjeu tragique. 

Gravity - Sandra Bullock : La star hollywoodienne des années 1990 fait un retour triomphal ces dernières années au box-office et aux oscars. Bien que Bullock soit souvent surestimée, on est forcé d'admettre que sa prestation bouleversante dans ce film est une prouesse dont peu de comédiens sont capables. Elle alterne la fragilité, le courage, la terreur, le desespoir et la jubilation avec un aisance époustouflante dans ce rôle éprouvant qui constitue l'apogée de sa carrière.

La Vie d'Adèle - Adèle Exarchopoulos : La révélation française de l'année. On émettra des réserves sur les méthodes d'Abdelatif Kechiche qui ne nous permettent pas encore de déterminer son potentiel en tant qu'interprète et non en tant que performatrice, mais le fait est qu'elle illumine les trois heures de ce récit. On ne voit qu'elle et on ne s'en plaint pas. Le jury de Cannes a eu bien raison de l'inclure dans les lauréats de la Palme d'Or tant elle est l'élément porteur du film.

Shokuzai - Kyoko Koizumi : Elle est le fil rouge de cette oeuvre : une mère épleurée revenant hanter cinq femmes après que celles-ci aient été incapables de dénonçer l'homme qui a tué sa fille, une sorte de sorcière de mauvais augure cherchant à s'assurer que le "pacte" qu'elle a faite avec elles soit respecté, avant de se faire prendre à son propre piège... La femme la plus fascinante, inquiétante et troublante de cette année, interprétée avec brio par l'une des actrices phares du Japon.

Zero Dark Thirty - Jessica Chastain : Doit-on rappeler qui est Jessica Chastain ? On sait depuis The Tree of Life qu'elle est prédestinée à une glorieuse carrière qui n'en est qu'à ses prémices. Elle s'empare ici d'un premier rôle qui aurait été réservé à un homme si le film de Bigelow était bêtement hollywoodien. Une passionnante relecture de Jeanne d'Arc par le biais d'une espionne si obsédée par sa "mission" qu'elle se perd dans un combat n'en valant peut-être plus la peine.

 

MEILLEURS ACTEURS DANS UN ROLE PRINCIPAL

Inside Llewyn Davis - Oscar Isaac : Habitué à des seconds rôles oubliables dans des films qui le sont tout autant (Robin des BoisSucker Punch), l'acteur trouve son premier très grand rôle chez les frères Coen avec ce bon musicien à qui il manque l'étincelle pour devenir un artiste de génie. Une éclosion admirable qui s'apparente déjà à un sommet de sa carrière. Espérons que non puisque Isaac a dévoilé trop de potentiel pour que l'on accepte à présent que celui-ci soit gâché.

Le Loup de Wall Street - Leonardo DiCaprio : Le "minet" de Titanic a prouvé depuis toute sa palette d'acteur en se retranchant dans des rôles sérieux et psychologiques. Paradoxalement, son héros le plus atteint est aussi son plus drôle. Aidé par des dialogues ciselés à la perfection et prêt à toutes les folies, DiCaprio est au sommet de son art. Il aurait même pu se faufiler dans la catégorie "second rôle" pour l'un des meilleurs méchants récents dans Django Unchained

Lincoln - Daniel Day Lewis : Le mythique et trop rare comédien ne revient que pour des rôles de prestige. Après l'erreur Nine, Lewis se rattrape magistralement avec son incarnation tétanisante de vérité du plus célèbre, iconique, paradoxal et passionnant président de l'Histoire des Etats-Unis. Un homme à sa (dé)mesure avec lequel l'acteur accepte de ne pas laisser exploser sa rage pour faire parler un côté mesuré, sage et mutin qu'on ne lui connaissait pas.

Mud - Matthew McConaughey : Il est la grande redécouverte cinématographique de ces dernières années. On l'avait relégué au rang de people musclé sans intérêt. Mal nous en a pris. Depuis son tour de force dans La Défense Lincoln, le meilleur acteur américain aujourd'hui ne cesse de nous asséner des uppercuts. Mud ne déroge pas à la règle, mais il aurait aussi pu trouver sa place dans la catégorie "seconds rôle" pour sa courte prestation délirante dans Le Loup de Wall Street

The Master - Philip Seymour Hoffman : L'un des plus incroyables comédiens étasunien apparus pendant les années 1990 compose un gourou aussi inquiétant et manipulateur que pitoyable. S'il s'est fait voler la vedette par un Joaquim Phoenix cabotin aux yeux des critiques lors de la sortie du film, on ne peut s'empêcher de considérer que sa partition est infiniment plus subtile et foisonnante. Dommage qu'Anderson ne se soit pas uniquement intéressé au parcours de ce personnage.

Extrait de la bande originale composée par Rick Smith pour TRANCE de Danny Boyle

MEILLEURS SCENARIOS

Cloud Atlas - Tom Tykwer, Andy et Lana Wachowski : Tiré un film du roman choral et foissonnant de David Mitchell semblait une gageure impossible à relever. Il a fallu six mains pour parvenir à lier intrinsèquement six récits de temporalités différentes. La véritable prouesse est d'avoir sû, dès l'écriture du scénario, comment ne jamais perdre le spectateur en plaçant précisément les changements d'époque et en unissant d'un même mouvement les moments charnières de chaque histoire.

 

Le Loup de Wall Street - Terence Winter : Le showrunner de l'excellente série Broadwalk Empire se remet au service de Scorsese en adaptant les mémoires du courtier déchu Jordan Belfort. Le résultat est une longue fresque barée (rallongée par les nombreuses scènes improvisées) qui parvient à décrire précisément un milieu de la finance fou et inaccessible au commun des mortels tout en orchestrant l'un des plus puissants "rise and fall" depuis Casino. Chaque réplique y claque comme un coup de fouet.

 

Rush - Peter Morgan : L'excellent scénariste britannique à qui l'on doit The Queen dresse une magnifique rivalité qui se transforme en relation amour-haine absolument passionnante qui s'inscrit dans une description détaillée du milieu des courses automobiles. La preuve de la réussite de ce script ? Nous amener une dernière course où l'on ne peut pas arriver à déterminer lequel des deux pilotes devrait vaincre l'autre. On n'avait pas vu meilleur dilemne sportif depuis Warrior.

 

Shokuzai - Kiyoshi Kurosawa : Certes, c'est une mini-série télévisée en cinq épisodes réunis en deux films lors de son exploitation sur le sol français. Mais cette fresque sur le Japon, noire, tragique, absurde, touchante, ironique et pathétique, est un parfait portrait des malaises qui agitent cette société et des fantômes qu'elle trimbale (ou finit par créer). Jonglant avec des ruptures de ton très osées, le script tiré de l'oeuvre éponyme de Kanae Minato donne l'occasion de voir, non pas un, mais cinq portraits de femmes aussi variés et complets que passionnants.

 

Zero Dark Thirty - Mark Boal : Un travail de recherche très important (pas étonnant vu le passif de journaliste d'investigation de Boal) qui aboutit sur une chronique fascinante, certes condensée mais ne sacrifiant aucun détail et n'éludant pas les aspects peu reluisants des deux "camps" adversaires. Boal se permet au passage de placer une héroine complexe et forte dans un genre cinématographique pourtant peu habitué à accorder ce type de faveur au "sexe faible".

 

MEILLEURS REALISATEURS

Gravity - Alfonso Cuaron : Après Les Fils de l'Homme, prodige de mise en scène accompagnant une renversante histoire universelle, il ne faisait plus aucun doute que Cuaron était l'un des grands génies que comptait le cinéma. Avec son film spatial qui s'impose comme une date dans la représentation du cosmos, il prouve qu'il est en fait un cran au dessus des Fincher, des Cameron et des Spielberg dans l'emploi de technologies avant-gardistes au service de récits humains transcendants.

Inside Llewyn Davis - Joel et Ethan Coen : Les deux frangins continuent leur bonhomme de chemin en tentant (puis en renonçant) de trouver un sens à l'art, à l'existence et au hasard. Au sommet de leur art et bénéficiant à présent d'un statut qui leur confère une certaine liberté de manoeuvre, les Coen assènent des séquences percutantes d'une richesse folle qui ne cessent de hanter et de faire réfléchir le public sur ses propres croyances et idées reçues.

Le Loup de Wall Street - Martin Scorsese : L'un des plus célèbres réalisateurs au monde et l'un des rares symboles encore vivaces du Nouvel Hollywood n'a pas dit son dernier mot malgré ses 71 ans. Gardant coûte que coûte une longueur d'avance sur la (jeune) concurrence, papy Marty livre carrément son film le plus agressif, cinglé, libre et débridé. Une tragédie bling-bling potache d'une noirceur et d'une subversion admirable où chaque plan fourmille d'idées de cinéma.  

Le Transperceneige - Bong Joon-ho : Le Spielberg sud-coréen ose faire un pas dans un cinéma international l'obligeant à se frotter à des pressions qu'il n'avait pas sur ses précédents projets élaborés dans son pays natal. Il mène pourtant la barque d'une main de maitre, refuse d'abandonner son style mordant et ne se fait pas dévorer par une consensualité toute américaine (son combat acharné contre Weinstein qui souhaitait remodeler le film est admirable).

Only God Forgives - Nicolas Winding Refn : L'esthète mégalo danois ne souhaite pas se reposer sur ses acquis. Probablement tracassé par le succès de son Drive qui risquait de l'adoucir, il orchestre sciemment la destruction de l'oeuvre qui allait le standardiser avec ce film radical qui fit hurler les pseudo-admirateurs de Refn. Les vrais fans reconnaitront immédiatement sa démarche jusqu'au-boutiste et applaudiront ce geste aussi suicidaire qu'audacieux et mémorable.

Extrait de la bande originale composée par Steven Price pour GRAVITY d'Alfonso Cuaron

PRIX SPECIAL DE LA SEQUENCE QUI CLAQUE

Django Unchained - Le diner chez Calvin Candie : Lorsque le Dr. King Schultz (Christoph Waltz) et Django (Jamie Foxx) rendent visite au riche et ignoble propriétaire Calvin Candie (Leonardo DiCaprio), ils ignorent que leur véritable motivation, emporter une esclave qui n'est autre que la femme de Django, a été percée à jour. Le suspense monte pendant un interminable diner. Lorsque Candie revient avec un crane pour expliquer l'incapacité des noirs à se révolter, on est bluffé par le talent de dialoguiste de Tarantino. Quand DiCaprio écrase un verre sous sa main en se blessant réellement mais en continuant à jouer, on est sidéré. Quand la jeune esclave est à deux doigts de se faire fracasser la tête par le marteau de Candie, on est accroché à notre siège. La tension en devient si insoutenable que la dernière demi-heure du film parait bien fade en comparaison.

Evil Dead EX AEQUO We Are What We Are - Le dernier "festin" : Si Evil Dead partait mal, ce remake d'un classique de l'épouvante s'améliore grandement au cours de son récit en livrant un flot d'atrocités plus innomables et enthousiasmantes les unes que les autres. L'emploi d'une tronçonneuse lors de l'ultime combat contre le démon permet d'assister à une boucherie gore extrêmement jubilatoire, d'une barbarie sidérante, sur fond de pluie de sang et de cabane en feu au milieu d'une forêt de cauchemar. Feast on this, motherfucker ! Idem pour le film de Jim Mickle qui avait les atours d'un drame austère avant que la monstruosité de cette famille pieuse et endeuillée ne soit peu à peu révélée. L'inéluctable gradation de l'horreur mène à un acte final innommable aussi grotesque et écoeurant que tragiquement logique et poétique. Qu'on adhère ou non à cette dernière séquence outrancière, elle ne laisse pas indifférent.

Gravity - L'explosion de l'ISS : Echappant à un incendie dans la Station Spatiale Internationale (ISS), l'astronaute novice Ryan Stone sort dans le vide pour détacher le parachute de son module de sauvetage qui s'est empêtré autour de la station et qui l'empêche de partir. Pendant qu'elle s'y attèle, le nuage de débris qui avait détruit sa navette a achevé son tour en orbite et revient tout démolir sur son passage. Les choses s'aggravent encore lorsque l'ISS explose en entrainant le module de Stone dans un tour de montagnes russes où le moindre contact avec un seul des millions de débris autour d'elle suffirait à la tuer. Attention, n'oubliez pas de respirez pendant cette scène car elle dure cinq terribles minutes !

Le Loup de Wall Street -  Les quaaludes au citron : Meilleure scène de drogue de l'Histoire du cinéma. On pourrait se contenter de dire cela pour justifier sa présence dans cette catégorie. Un monument de burlesque qui renvoie tous les pétages de cable hystériques de la bande d'Apatow au rang de "séquences pour cul-bénis". Vingt minutes où DiCaprio fait face à un Jonah Hill expérimenté afin de déterminer qui sera capable d'aller le plus loin dans l'auto-humiliation pour que le spectateur puisse pleinement savourer la déchéance pitoyable des salopards qu'ils interprètent. Le "bad trip" le plus hilarant, pathétique et sidérant de ces quinze dernières années. Au moins !

Zero Dark Thirty - L'assaut final : Véritable rupture dans la narration effreinée et élliptique de cette fresque qui met soudain à l'écart son héroine, l'opération des Forces Spéciales pour infiltrer une villa protégée et tuer le leader terroriste Ben Laden qui s'y cache est un modèle d'immersion. Un boulot phénoménal sur le son et la photographie nous amène à être aux côtés de ces soldats qui prennent d'assaut cette forterresse en pleine nuit et en territoire ennemi. Un morceau de bravoure quasiment en temps réel qui nous donne l'impression de découvrir et d'assiter en même temps à une bout d'Histoire que le cinéma se chargerait de nous révéler.

 

BONUS : LES MEILLEURES BANDES ANNONCES POUR UN FILM DE 2013

Cloud Atlas

Gravity

Le Loup de Wall Street

 

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