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3 janvier 2013 4 03 /01 /janvier /2013 00:52

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Titre original : Jack Reacher

Film américain sorti le 26 décembre 2012

Réalisé par Christopher McQuarrie

Avec Tom Cruise, Rosamund Pike, Robert Duvall,…

Policier, Action, Drame, Thriller

Un homme armé fait retentir six coups de feu. Cinq personnes sont tuées. Toutes les preuves accusent l’homme qui a été arrêté. Lors de son interrogatoire, le suspect ne prononce qu’une phrase : « Trouvez Jack Reacher ». Commence alors une haletante course pour découvrir la vérité qui va conduire Jack Reacher à affronter un ennemi inattendu mais redoutable, qui garde un lourd secret.

      

Tom Cruise avait connu une traversée du désert assez douloureuse après La Guerre des Mondes de Steven Spielberg et qui avait débuté par un éclatant pétage de plomb médiatique au cours de la promotion de ce très grand « blockbuster ». Des éclats ensuite répétés qui l’amenèrent à être « blacklisté » par Hollywood, et notamment par le studio Paramount qui distribuait alors sa série-phare Mission Impossible et qui s’est depuis radouci à son sujet. Cruise se trouva pendant un moment dans une position de faiblesse. Cela s’en est ressenti sur sa filmographie alors plus oubliable et qui, en plus, peinait pour la première fois à attirer les foules. Comme si le simple nom de Tom Cruise ne suffisait plus.

Mais c’est bien mal connaitre l’acteur maniaque, perfectionniste et mégalomane. Acteur précoce d’abord vu comme un de ces énièmes minets après Cocktail, Risky Business voire Legend de Ridley Scott,  il était passé au statut de star internationale avec le Top Gun de Tony Scott. A l’inverse du paquet d’acteurs à la gueule d’ange que l’on voit actuellement (Robert Pattinson, Daniel Radcliffe ou encore Zac Efron), Cruise a très vite compris que, pour survivre au milieu hollywoodien il lui faudrait prendre sa carrière en main. Une audace, un savoir-faire puis une indépendance qui le conduisirent à posséder sa propre boite de production et à financer lui-même des véhicules à sa propre gloire. C’est ce que sont à la base les quatre Mission Impossible dans lesquels il tient le rôle de vedette ; ce qui n’est pas forcément antinomique avec « ambition artistique » comme on sut le prouver les brillants opus de Brian De Palma et de Brad Bird.

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/73/53/20160789.jpgDémystification

En parallèle de ces projets prestigieux pour son image, parmi lesquels on peut rajouter Né un quatre juillet d’Oliver Stone ou encore le Rain Man de Barry Levinson qui disposaient d’un fort potentiel oscarisable, Cruise n’a jamais hésité à se plonger dans des projets plus risqués à même de ternir sa trop lisse image de héros juvénile. Son curriculum vitae dispose de quelques noms très enviables comme Stanley Kubrick (Eyes Wide Shut), Paul Thomas Anderson (Magnolia), Michael Mann (Collision), Neil Jordan (Entretien avec un vampire), Steven Spielberg (le beau doublé Minority Report et La Guerre des Mondes) ou encore le récent Tonnerre sous les Tropiques de Ben Stiller où il cassait minutieusement cette mythologie séduisante qu’il avait construite autour de sa personne pendant deux décennies. On peut aussi ajouter à cette liste non exhaustive les noms de Francis Ford Coppola (Outsiders), Martin Scorsese (La Couleur de l’Argent), Sidney Pollack (La Firme) ou encore Cameron Crowe (Jerry Maguire).

Une carrière fructueuse pour laquelle la totalité des acteurs au monde se damnerait et qui, en plus, lui a permis de tenir l’affiche avec quelques-unes des plus grandes célébrités au monde. Bref, hors de question d’abandonner un si beau parcours malgré quelques sauts périlleux ringardes sur le canapé d’Oprah Winfrey. A priori, Cruise a trouvé le remède à sa baisse de popularité : le rire. Depuis une poignée d’années, Tom Cruise a décidé de se moquer de lui-même. Cela est d’abord passé par Tonnerre sous les Tropiques où il était méconnaissable en vulgaire producteur obèse apparaissant comme une extrapolation grotesque et outrancière de son propre parcours autoritaire. C’est ensuite passé par Knight and Day de James Mangold. « Blockbuster » imparfait au service de sa comédien principal, le film de Mangold servait apparemment de catharsis pour l’acteur en manque de mission impossible. Il y reprenait officieusement le rôle d’Ethan Hunt, agent secret hyper sexy/intelligent/fort, pour mieux pervertir cette icone en la rendant légèrement irresponsable et en lui donnant un passif. Cruise rappelait qu’avant d’être un héros, un personnage de film a aussi été un enfant ; l’acteur mettait ainsi en abime toute cette carrière qu’il avait débuté adolescent.

Cette démystification se poursuivit avec Mission Impossible - Protocole Fantôme de Brad Bird où il reprenait réellement le rôle de Hunt et ne cessait de casser son élan super-héroïque en montrant que, dans la vraie vie, faire une cascade n’est pas si aisé qu’il n’y parait. Cette année, il est certes apparu dans une très anecdotique (pour ne pas dire mauvaise) comédie musicale intitulée Rock Forever, mais le rôle secondaire qu’il y tenait ne l’était en rien. Cruise poursuivait dans l’autodérision avec une dextérité inattendue, lui qui s’en tenait souvent au drame ou au film d’action, et y interprétait une lamentable ex-star du rock sur le déclin tentant de retrouver la rédemption et l’amour de son public (attention, toute analogie avec une star du cinéma est évidemment toute sauf fortuite). Le film fut un bide, mais plus pour la nullité de l’ensemble que pour la performance impliquée de Tom Cruise (foncièrement hilarant et, après coup, sans aucun doute la seule chose d’honorable dans ce film).

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/59/17/20408496.jpgNostalgie

Jack Reacherde Christopher McQuarrie (réalisateur de Way of the Gun et principalement connu pour être le scénariste d’Usual Suspect) amène un retour au premier degré pour ce masochiste de Cruise (au même titre qu’un autre ex-minet, Leonardo DiCaprio). Le film n’est pas dénué de « punchlines » bien senties et efficaces, mais l’atmosphère générale du long métrage est davantage macabre voire paranoïaque à tendance « complotiste ». Certes, on peut réduire ce Jack Reacher à un énième film nostalgique de cette période si désuète mais si riche qu’était le Nouvel Hollywood. Cette dernière est un peu une « Nouvelle Vague » qui plane, telle une ombre, au-dessus des nouveaux cinéastes américains en les persuadant qu’elle était l’apogée de leur cinéma national et qu’ils ne parviendront jamais à équivaloir artistiquement parlant des auteurs comme Scorsese, Coppola, Pakula ou encore Friedkin, alors au faite de leurs gloires.

C’est surtout à ce dernier qu’on pense, notamment lors d’une phénoménale course poursuite en bagnoles qui s’inscrit, de loin, comme la meilleure scène d’action de l’année mais aussi comme la plus percutante du genre depuis un bout de temps. On y retrouve aussi cette violence sèche et sporadique, certes plus canalisée quoique la censure se soit montrée étonnement laxiste pour une œuvre « PG-13 », ainsi que cette même fascination pour ces figures de la loi jamais très loin de l’illégalité (une figure à la mode dans une majorité des polars depuis les « seventies »). A la différence que, Tom Cruise oblige, cet ancien flic de l’armée ne commet jamais de boulettes, même lorsque celui-ci se laisse emporter par la colère. Ce qui fait de Reacher une figure archétypale marquante mais peut-être pas aussi humaine que les flics de Friedkin. En étant dénué de faillibilité, le personnage se révèle parfois un peu trop mono-expressif.

Jack Reachern’a pas été le dernier à être méchamment handicapé par une campagne promotionnelle désastreuse (mon dieu, cette affiche jaunâtre et photoshopée où la tête de Cruise est aussi grosse que son soi-disant corps !). La première bande annonce donnait la fausse impression d’un caprice de star souhaitant avoir son propre Drive. Si le film de Christopher McQuarrie se révèle très différent de celui de Nicolas Winding Refn, disposant d’une esthétique moins poseuse et moins disco-gay, la caractérisation de leur héros reste similaire : moins mutique que le « Driver » puisqu’il est clairement plus « grande gueule », Reacher masque derrière son physique attrayant une violence bien plus sournoise et sadique qu’il n’y parait. Ils ont tous les deux cette même aptitude à être des « fantômes » et à entrer puis sortir de la vie des gens sans crier gare.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/73/53/20356752.jpgFigure héroïque

Au point que ces deux personnages s’enveloppent d’une aura fantastique et mystique. Le « Driver » apparait comme un « ange exterminateur » immortel tandis que Reacher est à deux doigts d’être un super-héros partant au secours de la veuve et de l’orphelin. La dernière séquence conforte cette analogie envers une figure judiciaire surhumaine, un peu à la façon d’un Bruce Willis dans le chef d’œuvre de M. Night Shyamalan intitulé Incassable. Jack Reacher est très tôt présenté de manière surréaliste ; le policier Emerson (David Oyelowo) dira de lui qu’il est un « fantôme ». Il apparait et disparait comme bon lui semble, ne possède rien, voyage incognito en bus et porte des vêtements achetés sous un pseudonyme. Le nom de « Jack Reacher » est l’unique chose que possède réellement le héros du film de McQuarrie, justement l’exact inverse du « Driver » anonyme du long métrage de Refn.

Si ce personnage « bad ass », voulant faire écho aux justiciers violents et machistes interprétés par Clint Eastwood ou Steve McQueen, est l’une des principales qualités de Jack Reacher (Cruise sait parfaitement gérer un personnage ambigu, d’autant plus lorsque celui-ci est suffisamment mis en valeur à l’écran), il est aussi la cause de ses défauts. A côté de Cruise, les acteurs peinent à briller voire même à se faire une petite place. Richard Jenkins, Rosamund Pike ou encore Jay Courtney ont beau composer des personnages-figures intéressants, ceux-ci restent bien dans le cadre très délimité de « personnage secondaire ». Et ce, même si leurs interprétations sont assez crédibles, particulièrement celle de Courtney, ce qui n’était pas gagné d’autant plus qu’il va se compromettre dans le rôle du fils de John McClane dans le pas très rassurant Die Hard 5 de John Moore. Et si prendre Werner Herzog en méchant principal était une idée audacieuse et alléchante, ce choix n’aboutit hélas qu’à renforcer cette sympathique atmosphère de « série B » ; Herzog campant un « bad guy » mystérieux, balafré mais jamais très crédible en plus de n’apparaitre que dans une poignée de scènes.

A l’inverse d’Argo de Ben Affleck, autre « revival » du cinéma ricain des années 70, si Jack Reacher est aussi jouissif à voir c’est moins pour la qualité de son script que pour l’interprétation de son acteur principal et l’inventivité de la mise en scène de McQuarrie lors des séquences de tension et d’action (les passages dialogués sont souvent moins jubilatoires visuellement parlant). Le scénario n’est pas pour autant mal construit mais adopte une structure un peu trop linéaire au service d’une intrigue parfois anecdotique qui aurait mérité de se voir amputer d’une quinzaine de minutes pour gagner en efficacité. Et passer le premier quart d’heure, les personnages n’évoluent plus d’un iota. Seule une très poignante scène de « flash-back » confère de façon inattendue une identité aux cinq victimes du sniper et une ultime scène se révèle étonnement touchante par le biais du simple monologue d’un personnage.

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/73/53/20386410.jpgL’odeur de la poudre

Si surprise il y a, elle vient d’abord de son ambiance frôlant le « western » urbain, ce qui rapproche le film de McQuarrie au premier Inspecteur Harry de Don Siegel (Jack Reacher demeure infiniment moins dérangeant et « poil à gratter » que son modèle). Néanmoins, il y a de quoi être surpris, lorsqu’on s’attend à un énième « actioner », d’assister à une introduction de dix minutes complètement dénuée de dialogue. La mise en scène brute et viscérale de McQuarrie, qui est loin d’être un manche niveau réalisation contrairement à bon nombre de ses confrères scénaristes souhaitant passer derrière la caméra, remet les pendules à l’heure tandis que le spectateur prend soudain le point de vue d’un sniper tirant sans raison apparente sur une foule de pauvres citadins innocents.

Il est alors facile de comprendre pourquoi Jack Reacher ne performe pas avec la même efficacité que M:I 4 aux Etats-Unis. A cause d’une actualité brulante et sensible, le film de McQuarrie ne donne pas vraiment ce que le spectateur a envie de voir mais plutôt ce qu’il devrait voir, et ce, même si le film n’est pas muni d’un virulent discours anti-arme. On pourra néanmoins remarquer que Reacher, contrairement à ses adversaires, rechigne à utiliser un flingue lorsqu’il peut employer ses poings ; à l’exception, évidemment, de l’une des dernières grosses séquences où il y est quelque peu obligé. Reacher sous-entend aussi fortement qu’une partie de ces êtres fascinés par les armes le sont moins pour se protéger ou pour défendre sa patrie que pour essayer de les employer à l’encontre d’autrui (et peu importe cet autrui lorsque la frustration sociale est trop forte).

Mais le film ne va pas plus loin. Il ne va jamais plus loin et c’est peut-être là son principal défaut : être un brillant film de divertissement refusant de secouer plus que ça le spectateur. Au risque que ce dernier, une fois hors de la salle, ne garde plus qu’en mémoire l’ouverture et les deux séquences d’action monstrueusement efficaces. Et c’est probablement ces trois longues séquences qui rendent particulièrement indulgent. Car à l’heure où la moindre scène d’action est recouverte de CGI, il faut avoir une certaine audace pour faire deux morceaux de bravoure quasiment dénués du moindre effet numérique. Cela a un impact d’autant plus fort qu’ils sont renforcés par la bonne volonté d’un Tom Cruise désormais quinquagénaire et pourtant toujours aussi apte à jouer les casse-cou. Cette implication rend encore plus impressionnantes des séquences déjà prenantes. Rien de tel que de montrer que ce n’est pas du chiqué pour donner quelques sueurs froides au spectateur (comme dans la vertigineuse scène sur les parois du Burj Khalifa dans le dernier Mission Impossible).

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/73/53/20386403.jpgAdrénaline

Cette poursuite en voitures, sans la moindre musique afin de donner une prédominance aux sons de la carrosserie, qui n’hésite pas à faire de brutaux changements de rythme et qui tente d’accorder une importance à la vue subjective du conducteur principal pour renforcer le sentiment d’immersion, fait inévitablement écho aux inoubliables maitresses du genre qui ont rendues célèbres les deux films de William Friedkin, French Connection et To Live and Die in L.A. ainsi que le Bullit de Peter Yates. On est collé au siège devant l’efficacité sidérante de cette séquence dans laquelle Cruise fait facilement 80% de ses cascades. Et McQuarrie ne se gêne pas pour bien le montrer à l’aide de longs plans et d’un montage « old school » permettant de bien savourer le moindre détail ; soit l’inverse de ce que faisait la dernière grande poursuite de voitures au cinéma, à la fin de La Mort dans la Peau réalisé par Paul Greengrass.

Passé ce morceau de bravoure n’intervenant qu’après une heure et demie de film (Jack Reacher demeure avant tout un thriller plutôt qu’un film d’action), le long métrage de McQuarrie réserve un final jubilatoire et très tendu avec, en « guest star », le toujours aussi fringant et sympathique Robert Duvall. Les deux grands acteurs qui avaient partagé l’affiche du film de courses vraiment jouissif de Tony Scott, Jours de tonnerre, se retrouvent vingt ans après, ce qui n’est pas rien pour augmenter la sympathie que l’on peut avoir pour ce film tant leur complicité est restée intacte. McQuarrie met alors en scène une séquence d’assaut qui aurait pu être banal s’il ne la pimentait pas régulièrement par quelques rebondissements semant avec délice le trouble dans le plan bien huilé des deux compères.

Le tout s’achève sous une pluie battante, dans la boue et l’obscurité. A l’image de ce long métrage de divertissement, aux apparats de film d’action ludique qui révèle un cœur noir et violent. Le film de McQuarrie est tiré d’un bouquin intitulé « One Shot », huitième d’une série de plus de dix livres écrits par Lee Child et mettant en scène ce personnage de Reacher décrit comme un grand blond baraqué de deux mètres. C’est dire si les adorateurs des livres ont sauté en l’air en apprenant le choix du petit Tom Cruise brun qui, à l’instar d’un paquet d’acteurs ayant une apparence en contradiction avec le personnage qu’on leur a délégué (coucou Daniel Craig !), prouve que l’on ne devrait pas perdre son temps à juger du talent d’un acteur par son simple physique. Une idée préconçue qui est en train de voler en éclat avec la « performance capture » permettant dorénavant à un « enveloppé » comme Ray Winstone de jouer les éphèbes vikings dans La Légende de Beowulf de Zemeckis. Inutile de dire que l’on rêverait d’une suite sachant le nombre de livres restants et la qualité de ce premier « épisode » pas trop ambitieux mais bien généreux. Mais il est difficile pour un acteur de commencer une franchise quand on vient d’atteindre les cinquante balais. L’homme qui ne vieillit jamais entend d’ailleurs faire un nouveau changement de registre, plus science-fictionnel mais toujours aussi héroïque, avec Oblivion de Joseph Kosinski puis All You Need is Kill de Doug Liman.

NOTE :  7,5 / 10

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commentaires

L
First of all, thanks for the movie review! I am a big fan of Tom cruise and the Mission Impossible series is my favorite! Last week I saw the movie Jack Reacher and was shocked by seeing his stunning performance!
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