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17 juillet 2013 3 17 /07 /juillet /2013 14:59

Film américain sorti le 17 juillet 2013

Réalisé par Guillermo Del Toro

Avec Charlie Hunnam, Idris Elba, Rinko Kikushi,…

Action, Aventure, Science-fiction, Fantastique

Surgies des flots, des hordes de créatures monstrueuses venues d’ailleurs, les « Kaiju », ont déclenché une guerre qui a fait des millions de victimes et épuisé les ressources naturelles de l’humanité pendant des années. Pour les combattre, une arme d’un genre nouveau a été mise au point : de gigantesques robots, les « Jaegers », contrôlés simultanément par deux pilotes qui communiquent par télépathie grâce à une passerelle neuronale baptisée le « courant ». Mais même les Jaegers semblent impuissants face aux redoutables Kaiju. Alors que la défaite paraît inéluctable, les forces armées qui protègent l’humanité n’ont d’autre choix que d’avoir recours à deux héros hors normes : un ancien pilote au bout du rouleau et une jeune femme en cours d’entraînement qui font équipe pour manœuvrer un Jaeger d’apparence obsolète. Ensemble, ils incarnent désormais le dernier rempart de l’humanité contre une apocalypse de plus en plus imminente…

Le mexicain Guillermo Del Toro est un réalisateur quelque peu malchanceux. Si sa générosité a été prouvée de maintes fois, celle-ci a été constamment bridée par les moyens qu’on lui conférait pour mettre en scène ses films. A cela, il faut ajouter qu’il est atteint d’une boulimie de projets qui l’amène à élaborer plusieurs longs métrages à la fois sans jamais parvenir à les faire approuver par les studios. La plupart sont donc en « stand-by » et Del Toro a dernièrement dû se contenter de son rôle de producteur et de conseiller. Il a aidé un certain nombre de premiers films fantastiques, comme le récent Mama d’Andres Muschietti, Les Yeux de Julia de Guillem Morales ou encore le sublime L’Orphelinat de Juan Antonio Bayona, et il a passé ces dernières années à jouer les producteurs consultants à l’occasion de quelques récents films d’animation de DreamWorks (dont le plus notable et le plus révélateur de sa personnalité a été le magnifique Les Cinq Légendes, boudé à sa sortie). Si cela fait près de cinq ans que l’on n’a pas revu un nouveau film du maître des monstres depuis Hellboy II, c’est aussi parce qu’il a vu successivement deux de ses plus gros projets se casser la figure.

Il y a d’abord eu l’adaptation du « Hobbit », aventure « prequel » au Seigneur des Anneaux qui, après un interminable « developpment hell », fut repris par Peter Jackson. Les fans de l’œuvre de J.R.R. Tolkien étaient persuadés de ne pas perdre au change, notamment après les rumeurs indiquant une direction artistique assez osée lorsque Del Toro était à la barre, et les producteurs furent contents de revoir l’initiateur de la franchise au cinéma reprendre les rênes afin d’assurer une continuité rassurante et fructueuse avec la première trilogie. Del Toro laissa la main avec beaucoup de regrets après s’être investi près de deux ans sur le projet qui devait donner lieu à un dyptique (ce sera finalement une trilogie dont le second opus, La Désolation de Smaug, est prévu pour décembre prochain). L’échec du second projet fit encore plus de mal au cœur du cinéaste mexicain. Il s’agissait de son adaptation d’un roman S.F. à tendance horrifique, « Les Montagnes Hallucinées », écrit par le mythique auteur H.P. Lovecraft. Del Toro portait ce projet depuis quelques années et, à la fin de l’année 2010, il semblait enfin être sur le point de le faire aboutir. Produit par le pape du genre, James Cameron (Terminator, Aliens, Abyss, Titanic et Avatar) avec Tom Cruise dans le rôle principal, Les Montagnes Hallucinées s’annonçait comme le « blockbuster » 3D le plus excitant de ces prochaines années. L’unique problème de taille empêchant la réalisation de ce rêve de cinéma : l’équipe avait besoin de 150 millions de dollars pour concrétiser ce film. Hors, cela nécessitait un long métrage « PG-13 », ce qui était en contradiction avec la noirceur extrême du roman. La firme Universal, profondément fragilisée par de nombreux échecs financiers, recula au dernier moment malgré les grands noms affiliés au projet.

Del Toro se tourna ensuite assez rapidement vers ce Pacific Rim. Le projet en lui-même, malgré ce que de nombreux journalistes et autres oiseaux de malheur ne cessent de répéter avec une sorte d’espoir morbide de le voir s’écraser au box-office, est une véritable anomalie. Cela n’empêchera pas des incultes ne l’ayant souvent pas encore vu à le limiter bêtement à un mélange entre Transformers et Godzilla (évidemment la version ringarde, américaine et friquée par Roland Emmerich d’un personnage crucial dans la culture nippone). Dans un premier degré très louable, Pacific Rim rend hommage à tout un pan de la culture asiatique (entre autres l'anime Neon Genesis Evangelion) et aux « kaiju eiga », nom donné aux films de montres japonais qui furent notamment réalisés par Ishiro Honda (Godzilla en 1954), Takao Okawara (Godzilla vs. Mothra en 1992) ou encore Jun Fukuda (Le Fils de Godzilla en 1967). Mais s’il leur rend hommage, il demeure fermement détaché d’une quelconque franchise, s’abstient de clins d’œil trop appuyés et repose sur un scénario original élaborant sa propre mythologie (il ne reprend pas quelques « kaijus » célèbres comme Godzilla, Mothra, Gamera ou Rodan). Le film n’est donc pas un « remake », ni une suite et n’est ni adapté d’un « best-seller », d’une BD ou d’un jeu vidéo célèbre,….

Autant dire que les studios Warner Bros et Legendary Pictures qui ont produit le film étaient si méfiants envers ce projet qu’ils se sont partagés les coûts afin que les pertes soient plus limitées en cas de « flop ». Comble de l’horreur pour eux, malgré la possibilité que Tom Cruise incarne un personnage secondaire très charismatique qui sera finalement interprété par Idris Elba, aucune tête d’affiche n’est présente dans le casting. Aucune possibilité pour les studios de se tourner vers un nom vendeur pour soutenir ce film. En effet, les « stars » de Pacific Rim ne sont ni ses acteurs, même s’ils livrent tous des performances honorables (et notamment Rinko Kikushi qui dispose du personnage le plus intéressant et le plus étoffé), ni son scénario. Ils seront nombreux, les spectateurs, à regarder le film avec cynisme. Ils se gausseront du classicisme de son scénario qui a avant tout été écrit pour permettre des morceaux de bravoure relevant du jamais vu. Afin de ne pas désarçonner le public devant un spectacle qui, visuellement, se détache fortement de la sensibilité occidentale, Pacific Rim dispose d’une histoire carrée et prévisible afin que les spectateurs puisse se raccrocher à quelque chose au milieu de ces kaijus et de ces méchas géants qui garnissent les mangas mais qui demeurent bien peu présents dans la culture anglophone et, par extension, francophone.

Le film de Del Toro adopte ainsi la même stratégie risquée que l’Avatar de James Cameron. Dans le cas de ce dernier, elle l’avait rendu sujet à des quolibets incessants mais lui avait valu un triomphe international alors qu’il appartenait à un genre cinématographique qui n’en connaissait pas vraiment. L’histoire simple, prévisible même, permettait au spectateur de se repérer et d’apprécier davantage la révolution formelle qui accompagnait le récit. Cela n’empêchait pas le scénario d’Avatar d’être savamment et impeccablement construit, en plus d’entrer en résonnance avec l’expérience du spectateur qui se plongeait pour la première fois dans le nouvel univers de la 3D et de la perf-capture. Pour Pacific Rim, c’est à peu près la même chose. Del Toro mise sur un arc narratif quasi-archétypal, avec ses figures frôlant parfois le cliché dans le cas d’une poignée de personnages secondaires, afin que le spectateur parvienne à suivre le récit tout en se concentrant plus facilement sur ces actions et ce monde qui auraient pu le dérouter s’il ne disposait pas de la palanquée d’influences artistiques qu’a réuni le réalisateur (qui allait jusqu’à parler de la célèbre toile « Le Colosse » que l’on attribuait à Goya comme source d’inspiration). Il aurait été suicidaire pour Cameron de faire un scénario chausse-trappe, multipliant les « twists » comme dans Inception, alors que le spectateur devait déjà s’attacher à ces extraterrestres bleus aux têtes de chat. Il aurait donc été absurde que Guillermo Del Toro perde son public déjà méfiant envers le genre de son film en lui assenant une foutue intrigue complexe se perdant dans des thématiques alambiquées et en reléguant en arrière-plan des scènes d’action et de combat qui représentent avant tout la quintessence du « kaiju eiga ».

Alors oui, à l’inverse de 90% des films de divertissement actuels, Pacific Rim ne passera pas une heure et demie à déblatérer sur les multiples traumatismes alimentant un héros qui finissait généralement par oublier d’accomplir les actions héroïques pour lesquelles on était venu le voir. Il n’est pas non plus un pamphlet anti-américain s’attardant sur la fascination perverse du pays pour les armes de plus en plus destructrices. Et il ne fait pas un sempiternel écho au 11/09 lors des séquences étourdissantes voyant la désintégration de villes entières. Après tout, pourquoi pas puisque les premiers « kaiju eiga » faisaient références au traumatisme d’Hiroshima et de Nagasaki qu’ils tentaient d’exorciser à coups de villes réduites en cendres par des créatures titanesques contre lesquelles on ne pouvait rien. En l’état, Pacific Rim n’est pas un film sérieux. Il ne transporte pas de message moralisateur. Cela n’a jamais été son intention. Peu importe que son but soit avant tout de permettre à un genre nippon d’avoir enfin droit à son digne représentant à 200 millions de dollars (aucun « kaiju eiga » n’a eu droit à une pareille somme pour mettre en scène ses délires apocalyptiques les plus fous). Peu importe que son objectif soit aussi de libérer, dans toute sa splendeur et sa démesure, l’amour que porte Del Toro pour les créatures monstrueuses. Jamais le réalisateur mexicain n’avait disposé d’un tel chèque et, étonnement, d’une telle liberté pour retranscrire sur le grand écran ses rêves de gosse émerveillé. Puisqu’il n’a pu, par deux reprises, faire son grand film plein de bêbêtes visqueuses, griffues et terrifiantes, Pacific Rim fait office d’exutoire ainsi que de profession de foi.

Mais l’ambition de Pacific Rim, qui est si conspué pour en manquer, est d’offrir un « roller coaster » sidérant qui laisse son spectateur accroché à son siège, la mâchoire bloquée et les yeux globuleux pendant deux heures sans qu’il ait la désagréable impression d’avoir été floué et d’avoir perdu une poignée de neurones. Cela peut paraitre peu mais Hollywood en est à une période où l’intégralité de ses « blockbusters » ne daigne même plus garantir un spectacle pyrotechnique novateur. Combien d’entre eux ne sont que des « begin movies », introduisant un monde et un personnage pendant deux heures trente et livrant un final avare en prouesses qui constitue la seule et unique scène d’action du long métrage avant d’annoncer une inévitable suite ? Combien sont des lancements de franchises ayant une photographie terne et qui, occasionnellement, sont tuées dans l’œuf par un échec au box-office ? Elle est là, l’audace de Pacific Rim. Sous notre nez sans que beaucoup ne la voit. Probablement parce qu’elle est trop évidente. Premier sacrilège : le film de Del Toro ne dure que deux heures. Cela l’oblige à une économie et à une efficacité qui font gravement défauts aux autres concurrents étasuniens. Deuxième sacrilège : le film a un début, un milieu et une fin. Cela semble absurde, mais qu’il est agréable de voir un film qui, s’il pourrait appeler à une suite permettant de voir davantage de ce monde dépeint dans le long métrage, se tient parfaitement sans avoir besoin d’un second épisode pour répondre aux questions soulevées pendant les cents vingt minutes !

Et il y a l’action. Gargantuesque et complètement décomplexée. Autant dire, à l’opposé de la sensibilité actuelle. L’introduction, déjà plus impressionnante qu’Iron Man 3 tout entier, est posée en une vingtaine de minutes. Pas de digression supplémentaire. Tous les personnages sont présentés. Les enjeux sont posés. Les traumatismes moteurs qui animeront le trio principal afin de les outrepasser sont amenés impeccablement. Et après, roulez jeunesse ! La démesure éclate encore plus fortement alors qu’elle était déjà tétanisante lors du premier combat ouvrant Pacific Rim. On n’oubliera pas de sitôt la bataille dans Hong Kong qui frise les vingt minutes anthologiques. Del Toro ne se contente pas du strict minimum et orchestre des bastons homériques dont l’ampleur, la puissance, la folie et la beauté relèvent constamment de l’inédit. C’est bien simple, on passe la moitié du temps à se répéter que l’on n’avait jamais vu ça. Le bonhomme s’éclate constamment à jouer au jeu des échelles pour rappeler la taille aberrante des combattants monstrueux qui s’affrontent avec des pétroliers comme si c’étaient de simples bâtons de bois et qui se balancent à la figure des pans entiers de gratte-ciels. Cette impression de gigantisme est telle que le pourtant grand écran se révèle souvent trop petit pour englober les créatures titanesques.

Celle-ci est renforcée par une 3D qui est l’une des plus convaincantes vues à ce jour. De cette contrainte technique imposée après coup par les producteurs, Guillermo Del Toro en tire un atout non négligeable et prouve, après huit mois d’une conversion préparée par ses soins, qu’il s’est investi dans le moindre détail pour rendre son « bébé » le plus impressionnant possible. Si la première heure est relativement légère et n’abuse pas des apparitions de kaijus, afin que leur arrivée en masse soit plus forte, la seconde heure s’apparente à un grand huit coloré où les scènes d’action se déchainent dans un montage impeccablement pensé et parfaitement lisible. Encore une fois, Del Toro refuse à céder aux « gimmicks » actuels et préfère filmer en plans larges, sans abuser de la caméra à l’épaule ou de « lens flares » fatigants. Les images ne sont jamais coupées trop tôt, à l’inverse d’un Marc Forster pour lequel le pathétique World War Z avait eu droit à une indulgence bien saugrenue alors que son montage enchainait un plan parkinsonien chaque seconde en annihilant toute spatialisation de l’action. Chez Guillermo Del Toro, on sait toujours où on est et qui fait quoi. Plus fort encore, détruisant ainsi le mince espoir de voir Pacific Rim être catalogué comme un « blockbuster » U.S. lambda, le film de Del Toro, malgré sa thématique obligatoirement apocalyptique, se refuse à céder au pessimisme et à la morosité ambiante. Un peu comme le Superman de Richard Donner et La Guerre des Etoiles de George Lucas vers la fin des années 1970.

Au sein de ce barnum sensoriel, il y a des frissons, de l’adrénaline et de l’humour (l'impayable personnage incarné par Ron Perlman). Mais il y a aussi des touches de drame assez fortes, notamment grâce à la belle relation entre la jeune pilote japonaise Mako (Rinko Kikuchi) et Stacker Pentecost (Idris Elba). Celle-ci voit la plus belle séquence du film avec un « flashback » si incroyable, si poignant et si tétanisant par son jeu des proportions (une petite fille apeurée poursuivie par un monstre de cent mètres de haut) qu’il annihile toute tentative de rapprochement sérieuse entre Pacific Rim et la trilogie robotique de Michael Bay. Guillermo Del Toro prouve encore plusieurs choses au cœur de cette séquence époustouflante. D’abord, qu’il n’a rien perdu de sa capacité à filmer la fin de l’innocence et les peurs enfantines comme il avait déjà su le faire si brillamment dans L’Echine du Diable et Le Labyrinthe de Pan. Ensuite, que son aptitude à iconiser ses personnages en quelques plans et à instiller en une seule séquence des enjeux narratifs suffisamment forts et immédiatement compréhensibles pour tenir tout le long du film est demeurée intacte malgré la pression constante de ses producteurs. Autant dire qu’à ce simple niveau-là, Guillermo Del Toro en laisse beaucoup sur la route avec son talent pour aligner les images dont la composition imprègne sur le champ la rétine. Il est à mille coudées au-dessus de faiseurs comme J.J. Abrams, Josh Whedon, Len Wiseman, Marc Webb, Jon Favreau,….

A une époque où John McTiernan est en prison et que James Cameron pond un film toutes les décennies, Guillermo Del Toro nous ramène à l’époque bénie du « blockbuster » qui claquait. Il nous renvoie à une ère où des auteurs comme George Lucas et Steven Spielberg régnaient sur le paysage du grand spectacle cinématographique en s’attelant avec passion, audace et inspiration à des films d’aventure nobles qui devaient en mettre plein les mirettes aux spectateurs afin de le faire revenir en enfance. C’étaient des films « régressifs » qui, au lieu de rendre crétin son public, faisait en sorte que sa capacité d’émerveillement et d’imagination soit décuplée comme elle pouvait l’être lorsqu’il avait dix ans et qu’une poignée de jouets lui suffisait à créer des histoires merveilleuses et impossibles. A l’instar de Pacific Rim, ces films considérés maintenant comme des chefs d’œuvres furent méprisés et perçus comme des objets creux et débiles. En effet, Jurassic Park, La Guerre des Etoiles ou Indiana Jones et le temple maudit n’ont jamais livré un propos intellectuel. Et entendons-nous bien : ces films demeurent le summum du « roller coaster ». Leur intelligence ne se montrait pas tant dans ce qu’ils racontaient que dans la manière dont ils le racontaient. Le génie de ces films apparaissait dans leur confection, dans l’élaboration de leur univers et dans la manière de faire coordonner, interagir et évoluer leurs personnages par l’action plutôt que par le dialogue. Leur intelligence venait de leur mise en scène parfaitement pensée afin que chaque séquence aboutisse à un effet bien déterminé. Oui, ce n’est pas une intelligence tapageuse qui se la raconte en société à coups de discours anticapitalistes. Mais cela reste quand même une forme d’intelligence.

A l’instar de ces œuvres « funs » extrêmement divertissantes et généreuses parmi lesquelles on pourrait inscrire Le Hobbit de Peter Jackson qui était sorti il y a quelques mois, on pourrait faire une liste complète de défauts. Mais ceux-ci ne parviendraient pas à ternir l’impact de ce long métrage tant ses qualités outrepassent de très loin ses faiblesses. Le héros au cœur pur est un peu transparent comme tous les héros parfaits ; Luke Skywalker n’était pas moins unidimensionnel dans le premier épisode de Star Wars. C’est même leur force car l’on peut facilement s’y identifier (un « truc » que Hergé avait employé pour son Tintin). On aurait aussi aimé voir davantage les pilotes russes et chinois ainsi que leurs Jaegers respectifs. On pourra au moins être heureux de voir que, même si ce sont encore les américains qui ont évidemment la part belle (l’œuvre reste produite en majeure partie par les Etats-Unis), Pacific Rim est loin d’être aussi ethnocentré que bon nombre de films catastrophe. Quelques scènes sont aussi prévisibles plusieurs minutes à l’avance. Le film en est probablement conscient. Certains longs métrages extrêmement classiques ne sont pas affaiblis par ce côté « attendu », au contraire parfois (on peut citer Warrior de Gavin O’Connor ou Avatar à titre d’exemples). Si le spectateur ne joue pas les cyniques à qui on ne la fait pas, ces ficelles n’entraveront en rien la jubilation qu’il prendra à ce spectacle-mammouth. D'ailleurs, son scénario est loin d'être avare en discrètes audaces : la manière peu conventionnelle avec laquelle Del Toro conlut la relation tissée entre la belle Mako et le pilote-héros achève de transformer le film en un OFNI. Le seul vrai reproche que l’on peut faire à Pacific Rim est cette musique assez décevante composée par Ramin Djawadi à qui l’on doit le thème de la série « Game of Thrones ».

Pour le reste on se délectera devant un film qui pousse chaque aspect de sa mise en scène, de sa photographie somptueuse, de ses effets spéciaux bluffants et de sa faramineuse direction artistique (la plus belle, la plus précise et la plus inventive vue dans un film à gros budget depuis au moins le dernier long métrage de Cameron) pour devenir le « kaiju eiga » et le « blockbuster » définitif. Là où des films à 200 millions de dollars sortent toutes les semaines sans jamais montrer la raison pour laquelle ils nécessitaient une telle somme, Pacific Rim tire pleinement profit de son budget pour livrer un tour de manège de deux heures qui sidère en même temps qu’il fait jouir son spectateur. Un film de studio d’auteur où la personnalité de son réalisateur transparait par le genre même qu’il aborde et le monde futuriste et « steampunk » qu’il développe. Les plus critiques réduiront sous un ton méprisant le long métrage à un film pour gamins. Répondons-leur qu’il s’agit d’abord d’un film pour ceux, de tout âge et de tout sexe, qui ont réussi à conserver un soupçon d’âme d’enfant malgré une société cynique prompte à démolir toute mythologie fédératrice et la moindre envie d’évasion qui ne soit pas régit par les règles du « réalisme » et de la « psychologie de comptoir ». Pacific Rim est destiné à ceux qui veulent frissonner, s’extasier, rire, s’émouvoir, être apeuré puis effaré. Si les cyniques et les hautains se gausseront d’un tel projet et refuseront de monter dans ce train fantôme, ceux qui en sortiront n’auront qu’une envie : revoir ce divertissement haut de gamme qui s’inscrit dans ce que l’Amérique a fait de mieux et de plus impressionnant dans le genre depuis Mission Impossible 4 – Protocole Fantôme de Brad Bird en 2011 et Speed Racer des Wachowski en 2008.

NOTE : 8.5 / 10

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commentaires

E
Tu nous l à tellement vendu avant de l avoir vu ce film qu' il est difficile de totalement te croire dans ta critique ditiranbique.
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D
Je ne pense pas avoir survendu ce film sur ce blog. Le seul moment où j'en ai parlé un peu longuement a été pendant mon article sur &quot;les 10 événements cinématographiques de cette année que j'attendais&quot; et 80% du texte était purement informatif.<br /> <br /> Je crois avoir déjà fait preuve de suffisamment de largesse d'esprit pour ne pas que mes avis soient prévisibles. Ex : <br /> - Je déteste Zack Snyder, mais ça ne m'a pas empêché de beaucoup aimé son Superman.<br /> - J’exècre le cinéma de Kechiche et j'ai plutôt bien aimé La Vie d'Adèle.<br /> - Je n'aime pas Will Smith et je trouve que Shyamalan est en pleine décadence, mais j'ai fait partie d'une minorité de blogueurs en France à tenter de défendre son film qui était loin d'être un navet à mes yeux.<br /> - etc...<br /> <br /> Et je pense que ma critique de Pacific Rim est suffisamment étoffée (si tu l'as lue) pour qu'on ne la limite pas à un &quot;tweet&quot; lapidaire se contentant d'un &quot;Trop génial, je vous l'avais bien dit !&quot;

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